La Correction

L'exposition « La Correction » de Yan Tomaszewski au LEMME revisite le format du cabinet de curiosités, transformant l'espace-sculpture de Pierre Vadi en un lieu où art, histoire et fiction se rencontrent. Comme ligne directrice de cette exposition, un film, réalisé pendant la résidence internationale de l'artiste franco-polonais à la Ferme-Asile d’octobre à décembre 2024 ; un récit explorant les imaginaires du Rhône et des procès d'animaux. Les artefacts présentés au LEMME, organiquement liés à ce travail cinématographique, tissent des liens entre les méandres du fleuve et le corps fluide et sinueux de l'anguille.

La "correction" du Rhône, terme technique devenu lexique régional valaisan, se mue en une métaphore à plusieurs niveaux : géographique, physique et morale. Tomaszewski examine notre tendance à vouloir "redresser" ce qui est naturellement sinueux, qu'il s'agisse d'un cours d'eau ou d'une espèce animale. Le serpent, figure du mal souvent confondue avec l'anguille, s'immisce dans ce récit.

Le fait historique que fut l'excommunication médiévale des anguilles du lac Léman apparaît comme une tentative de purification symbolique, où la "correction" devient un acte de domination sur la nature. L'artiste questionne ainsi notre relation contemporaine à l'environnement dans un contexte où les anguilles sont en voie critique d'extinction, notamment en raison de l'artificialisation des fleuves.

Avec l'introduction d'un robot « post-anguille », l'exposition oscille entre le médiéval et la science-fiction, estompant les frontières. Elle nous pousse à repenser nos narratifs sur l'environnement, à regarder au-delà des lignes droites et des classifications rigides. Dans ce cabinet de curiosités moderne, Tomaszewski offre un espace d'exploration plutôt qu'une réponse définitive. Son œuvre suggère que la véritable compréhension naît de l'acceptation de la complexité et du mouvement, de ce qui échappe à notre contrôle.

En conclusion, on pourrait se demander, avec une pointe d'ironie, si, après tant de "corrections", le Rhône n'aurait pas dû apprendre sa leçon et se tenir droit une bonne fois pour toutes. Mais peut-être que, comme l'anguille insaisissable, le fleuve nous rappelle que la nature a ses propres desseins, qui échappent à notre obsession de la ligne droite.

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